Excellence opérationnelle, cartographie de process et amélioration du service client

Qu’appelle-t-on excellence opérationnelle ? 

Le concept d’excellence fait référence à la notion de perfection, qui ne peut être meilleure, reflétant un engagement continu envers l'amélioration. Le concept opérationnel fait lui référence aux actions d’une entreprise ou organisation et se rapporte donc aux processus, aux interactions entre personne et à la façon dont un service ou un produit va être rendu. 

L'excellence opérationnelle se réfère donc à l'approche globale visant à optimiser les processus, éliminer les gaspillages et améliorer continuellement la performance opérationnelle d'une organisation. C'est une quête constante d'efficacité, de qualité et de satisfaction client.

Qu’appelle-t-on chaîne de valeur ?

Une chaîne de valeur est une série d'activités que réalise une entreprise pour délivrer un produit ou un service, depuis la conception jusqu'à la livraison finale au client. La chaîne de valeur est un concept clé du Lean, visant à rendre les opérations plus efficaces et à concentrer les efforts sur les activités générant réellement de la valeur. 

Ces activités sont divisées en deux catégories : les activités directement liées au produit ou service (activités primaires) et celles qui les soutiennent (activités de soutien). 

Trois familles de valeur :

  • Valeur ajoutée (VA) : étape d’un processus pour lequel le client est prêt à payer.
  • Non valeur ajoutée (NVA) : étape d’un processus pour lequel le client ne souhaite pas payer car elle ne contribue pas directement à la création de valeur perçue par le client (stock, déplacement matière…) => à éliminer
  • Non valeur ajoutée mais nécessaire à l’entreprise (NVAE) : activité pour laquelle aucun gain n'est perçu par le client mais qui est nécessaire au bon fonctionnement de l'entreprise (Livraison du produit, inspection qualité…) => à réduire si possible

Comment analyser ses process ? Par où commencer ? Comment les améliorer ?

Pour faire un bon diagnostic, la cartographie de la chaîne de valeur est idéale : la VSM (value stream mapping).

Cela consiste en premier lieu à se poser les questions suivantes : 

  • Qui est votre client? 
  • Qui est votre fournisseur? 
  • Quel est le processus que vous souhaitez analyser (quantifier les VA et NVA) ?

L’analyse de la valeur va balayer tous les flux physiques, les flux d’information, créer une ligne de temps (temps que mets le produit à traverser le flux) et lister tous les irritants du processus (gaspillages, irrégularité dans le flux, suractivité…) voir le tableau des 8 mudas (gaspillage en japonais).

Tableau des 8 mudas

Exemple de diagnostic à mener selon le secteur : 

  • Industrie : processus de production dans une usine qui traverse des difficultés au niveau de sa trésorerie
  • Service : souhait d’améliorer l’expérience client dans une concession automobile

Le diagnostic peut être imprimé sous forme de carte ce qui rend des processus complexes plus compréhensibles et permet de constater visuellement des choses à priori complexe : 

Qui fait quoi ? Combien de temps le produit met pour traverser le flux ? Où sont les gaspillages ? Comment est répartie la chaîne de valeur ? Ce qui permet ensuite de prioriser les améliorations avec un plan d’action et un tableau listant les différentes économies ou résultats attendus.

Méthodes :

  1. Réunir les bonnes personnes : 

Il est recommandé d’avoir un membre de la direction ou une personne cadre qui connaît l’intégralité des processus. Pour renforcer l'équipe, il serait idéal d'inclure un expert en méthode, en production, en maintenance, ainsi que la participation active des opérateurs du processus.

  1. Construire le cadre Fournisseur, Processus, Client : 

On peut à présent établir le cadre. Identifiez le client, le fournisseur, le processus retenu et les interactions avec des flèches. Un cadre bien construit est la base d'une cartographie réussie. 

  • Client : Qui sont les bénéficiaires finaux ?
  • Fournisseur : D'où proviennent les matières premières ou les informations ?
  • Processus retenu : Quelle activité sera intéressante à cartographier en priorité ?
  • Flèches : Représentation visuelle des flux entre le client, le fournisseur et le processus. 

-> Méthode possible : FIPOC/SIPOC

  1. Description du processus :

Maintenant que le cadre est en place, passez à la description du processus retenu. Cette étape est cruciale pour comprendre comment chaque activité contribue à la création de valeur.

Comprendre le processus :

  • Quelles sont les étapes clés ?
  • Combien de cases processus faire apparaître dans la cartographie ?
  • A quel niveau de détail ?
  1. Description des Flux d'Information :

Concentrez-vous ensuite sur les flux d’information.

Comment se fait la communication entre les différentes étapes du processus :

  • Appels téléphoniques ?
  • Mails ? 
  • Flux électroniques ?
  • Données issues de l’ERP / MRP ?
  • Flux d’information papier ?
  • Kanbans (prélèvement, production…) ?
  • Boîtes de lissage de la charge (séquencement) ?
  1. Collecte des données et description précise des étapes :

Poursuivez avec la collecte des données et la description détaillée de chaque étape du processus. C'est là que la cartographie devient plus pointue.

Détails à collecter :

  • Fournisseurs /clients : fréquence des expéditions/des commandes, demandes client, taux de service, ... etc.
  • Processus : Takt time (rythme de production adapté à la demande client), temps de cycles des opérations, changement de lot, TRS, % rebut, nombre d’équipe, temps de travail effectif par équipe, ... etc.
  • Stock : indiquer la quantité de pièces et le nombre de jours pour écouler ce stock en fonction du Takt (loi de Little).
  • Flux : Sont-ils poussés ou tirés ? Avec des dépôts de stockage type supermarché ou avec du PEPS/FIFO (1er entré, 1er sorti) ? ... etc.

Plus vos données sont précises, plus votre cartographie sera puissante.

Avec une compréhension approfondie de ces deux étapes, nous sommes désormais mieux armés pour effectuer un diagnostic des activités sans valeur ajoutée (NVA) en ayant une vision globale du processus.

  1. Établir la Chronologie :

La cartographie de la chaîne de valeur exige une compréhension claire de la chronologie. Dessinez une ligne des temps sous les étapes du processus pour visualiser les délais d'exécution à chaque étape.

  • Identifiez les étapes critiques.
  • Mettez en évidence les étapes de VA et de NVA.
  • Obtenez une vue d'ensemble du processus du début à la fin.

Loi de Little pour quantifier les stocks en durée : Encours (NVA) = Qté stock / demande moyenne sur la période (Takt)

  1. Faire Apparaître les Gaspillages (Muda) :

Un aspect clé de la cartographie de la chaîne de valeur réside dans l'identification des gaspillages. Ces éléments non productifs peuvent entraver l'efficacité globale.

Types de gaspillages :

• Surproduction 📈

• Attentes⏱️

• Transport inutiles 🚚

• Processus excessif 💸

• Stocks 📦

• Non-qualités 🤕

• Mouvements inutiles 🏃

• Potentiel humain inexploité 👷

En les mettant en lumière en groupe et en les plaçant sur la cartographie, vous pouvez commencer à les éliminer.

1ère partie de l’analyse VSM : état actuel du processus

  1. Créez votre VSM idéal et établissez votre plan d’action :

Caractéristiques d'un processus idéal :

  • Satisfaction des clients (internes et externes) maximale.
  • Flux de travail optimisé :
    • Mise en place d’un flux continu partout où c’est possible.
    • Introduction d’un flux tiré lissé là où le flux continu est difficile à instaurer.
  • Gaspillages éliminés.
  • Délais d'exécution réduits et temps de traversée produit optimisé.
  • Ratio de tension de flux amélioré (réduction de la part de NVA dans le processus).
  • Taille de lot ajustée en fonction de la demande client moyenne.
  • Processus cadenceur de la chaîne de valeur mis en place par exemple :
    • Au poste d’assemblage final.
    • Juste avant un poste à références multiples ou un poste de personnalisation.
    • Etc.
  • Gestion des flux d’information et de matière optimisée :
    • Implantation de différents types de kanbans (prélèvement, instruction...).
    • Mise en place de boîtes de lissage pour réguler la production.

En créant un modèle idéal en groupe, vous établissez un objectif à atteindre avec un plan d’action. Cette étape est plus longue que la partie diagnostic en général. On peut faire évoluer sa cartographie cible, rappelez-vous : nous faisons de l’amélioration continue en groupe. 

Voilà une première feuille de route pour chercher le processus idéal maximisant la valeur ajoutée pour le client !

2ème partie de l’analyse VSM : état cible souhaité du processus

  1. Bilan : 

En analysant sa propre chaîne de valeur, une entreprise peut identifier les activités qui créent le plus de valeur pour le client et celles qui pourraient être optimisées ou éliminées pour améliorer l'efficacité et la rentabilité globale.

Dans l’exemple précédent, il est intéressant de comparer les délais de fabrication et les temps de traitement.

L'objectif de l'analyse de la chaîne de valeur est d'obtenir un avantage concurrentiel en comprenant mieux comment une entreprise peut différencier ses activités de celles de ses concurrents et comment elle peut optimiser chaque maillon de la chaîne pour améliorer sa performance globale.

Quels types d’indicateurs peut-on suivre pour piloter au mieux son activité ?

On retrouve fréquemment les six familles d’indicateurs “SMQCDE” : Sécurité, Management, Qualité, Coût, Délai, Environnement. 

Lorsque l’on a découpé l’activité en plusieurs parties, on peut ensuite créer des indicateurs pour chaque domaine afin de mesurer sa progression sur une partie du process par rapport au SMQCDE : 

  • Nombre d’accident par catégorie par jour (Sécurité)
  • Satisfaction employé via une borne (Qualité)
  • Débit d’une activité (Délai)
  • Avance / retard d’une activité (Délai)
  • % de préventif réalisé à date (Sécurité, Management)
  • Nombre de produit/service réussi du 1er coût (Qualité)

Avec ces indicateurs, la finalité d’une entreprise étant de suivre : 

  • Les rentrées d’argent (throughput)
  • L’argent immobilisé dans le système (stocks)
  • L’argent qui sort du système pour transformer ses stocks en throughput (coûts de fonctionnement)

Exemple d’indicateur 

Quels sont les freins à l’excellence opérationnelle ? 

Cela peut sembler complexe sans compétences en interne sur les métiers du lean management, la qualité, l’hygiène sécurité et environnement etc.

Une entreprise peut continuer à fonctionner sans amélioration continue. En admettant les imperfections et les gaspillages de ces processus, elle subira alors une diminution de sa marge bénéficiaire.

Par la suite, cette organisation pourrait être tentée de réduire ses coûts fixes, qui sont néanmoins des actifs essentiels de l'entreprise (comme la suppression de postes ou les formations), au lieu de concentrer ses efforts sur l'optimisation des gaspillages.

En règle générale, on distingue deux catégories d'organisations : celles qui disposent des compétences internes et qui anticipent les améliorations pouvant être réalisées à long terme. D'un autre côté, il y a celles qui adoptent une vision à court terme sans nécessairement prendre du recul sur le fonctionnement à long terme de l'entreprise.

Quel est l’horizon de temps pour avoir des premiers gains et une rentabilité ?

Les bénéfices initiaux peuvent être observés dès la première semaine, notamment grâce à des pratiques telles que le 5S et la mise en place d'animations à intervalles courts (AIC). En revanche, lorsqu'il s'agit de chantiers d'analyse de flux (VSM), l'horizon temporel s'étend généralement sur une base mensuelle à annuelle. À la suite de cette analyse VSM, une feuille de route émerge naturellement, comprenant des projets de complexité variable.

Par exemple, les gains obtenus peuvent se traduire par une amélioration de 20% des performances, une réduction de 30% des accidents et un gain d'espace de 50%, entre autres.

=> Pour aller plus loin : 

  • S’exercer sur un produit/service d’un petit périmètre pour s'initier à la cartographie de la chaîne de valeur
  • Consulter les posts de l’auteur de l’article Gaël Prevostat
  • Découvrir le lean management et se faire accompagner par Axelean.
  • Des lectures additionnelles :
    • "The Toyota Way: 14 Management Principles from the World's Greatest Manufacturer" par Jeffrey K. Liker - L'auteur examine les pratiques de gestion de Toyota, qui sont à la base du Lean Management, et présente 14 principes clés.
    • Le But, Un processus de progrès permanent.” Eliyahu de M. Goldratt et Jeff Cox, ce livre est un roman d'affaires qui introduit les principes de la Théorie des Contraintes (Theory of Constraints - TOC)
    • Au cœur de l'ingénierie Toyota” Toyota est connu pour l’excellence de son système de fabrication dont est issue la théorie du Lean. Ce que l’on sait moins c’est qu’ils ont réussi à la transposer avec succès à la conception produit.
    • "Creating Continuous Flow: An Action Guide for Managers, Engineers & Production Associates" par Mike Rother et Rick Harris - Ce livre propose un guide pratique pour créer un flux continu dans les processus de production.